Le lavoir et la fontaine des Mouras de Madiran
La légende des Mouras et de Mayka la Mourelle
Est narré quès tems anciens
Quand transierent Sarrazins,
En Espagne se rendan
Lors, advinet qu’a Madiran
Fust ayecmé d’une Mourelle
Dicte Mayka la belle
Ung honeste chibalier
Qué Moures fisrent bruslier,
Lors Mayka, perdant l’esprict.
Selon la légende de la fontaine des Mouras, les troupes Sarrasines en déroute après leur défaite à Poitier, prennent leurs quartiers à Madiran avant de passer en Espagne. Une bataille a lieu, les opposant aux quelques bigourdans encore en état de se battre après le premier passage des maures. A leur tête se trouve le chevalier Jehan. Les combats sont rapides, sanglants et les cadavres des madiranais jonchent les coteaux. Les Sarrasins installent donc leur campement en contrebas du village en ruine.
Parmi les servantes du chef maure, se trouve la belle Mayka. Le soir, elle se rend à la fontaine pour y remplir sa jarre d’eau fraîche. Tandis qu’elle goûte la paix et la douceur de la soirée, elle entend les râles d’un mourant au milieu des joncs. Les souvenirs cauchemardesques des massacres lui reviennent. Au lieu de fuir comme la raison le voudrait, elle s’avance et écarte les branches. Un guerrier gît dans l’herbe. Transpercée par une flèche, sa côte de maille est rouge de sang. L’homme est d’une beauté royale. Il s’agit du chevalier Jehan. Mayka, émue par ce noble ennemi, se penche pour lui offrir à boire et lui promet de guérir sa blessure. Elle profite de l’obscurité pour aller quérir des onguents au campement et revient soigner le chevalier au bord de l’agonie. Alanguie par son amour naissant et harassée par les terribles émotions de la journée, la belle Mayka s’endort au côté de son chevalier.
Au matin, les troupes se préparent au départ vers l’Hispanie. C’est un hurlement terrible qui réveille Mayka et Johan. Arrachés à leur lit de joncs, ils sont aussitôt attachés à des arbres. Le chef maure prononce alors la sentence : Mayka devra regarder Johan bruler vif. Abandonnée par les siens, elle est recueillie par des madiranais charitables.
La légende veut que Mayka la mourelle repose près de la fontaine, à l’endroit où elle s’allongea près de Johan.
Aujourd’hui le lavoir et la fontaine des mouras sont de beaux exemples de patrimoine vernaculaires restaurés. Signe que les madiranais ont toujours pris soin de leur héritage, les archives évoquent les plusieurs campagnes de travaux, notamment par les forgerons Pélanne et Barthe. Le lavoir, de belle taille, a l’architecture typique des lavoirs de Bigorre.
La fontaine de Sainte-Poupette de Madiran
Dans le quartier des Bourdies se trouve une grotte d’où sort un petit ruisseau. Celui-ci alimente la fontaine désignée dans le livre terrier de 1660 sous le nom d’arrieu de Sainte-Pourpette (tradution compliquée). La légende veut que les femmes ayant des difficultés à allaiter trouvent un remède en trempant leurs seins dans la fontaine ou en buvant son eau.
Cette légende vient des formes particulières qu’ont prises les roches au fils du temps. La grotte semble en effet ornée de seins, tétons et mamelles de toutes espèces confondues.
Léon Gedefroy la décrit déjà en 1644 dans son Extrait des voyages en Gascogne, Bigorre et Béarn. Au XIXe siècle une autre source atteste à son tour de la présence de la source de Sainte-Poupette et de sa fréquentation par les femmes de la région.
La région de Madiran est riche de nombreuses sources et lavoirs, comme les fontaines des mourras et de Sainte-Poupette. Autour de ces lieux emblématiques du patrimoine culturel, vernaculaire et immatériel, des légendes sont brodées sur un écheveau d’histoire.